Présentation

L’ostéopathie viscérale est sans doute le versant le moins connu de l’ostéopathie, tant auprès des patients que du monde médical. L’étymologie même du mot ostéopathie fait penser en priorité aux pathologies musculo-squelettiques.

L’ostéopathie viscérale est pourtant largement documentée et se fonde sur des tests et des manipulations directes ou indirectes des organes des systèmes respiratoire, digestif, hépato-rénal, urinaire et reproducteur du corps. Ainsi, l’ostéopathe procède à une palpation fine pour repérer et délimiter la position et le mouvement de tous les organes, système par système ; ainsi que leurs moyens d’union et de soutien : les ligaments et les fascias. Puis, il met en lien les dysfonctions viscérales relevées avec celles des systèmes musculo-squelettique et cranio-sacré. Tous ces systèmes sont interdépendants. En effet, il arrive qu’une douleur dans le bas du dos soit causée par des dysfonctions viscérales. Dans ce cas, leur traitement est nécessaire pour obtenir une rémission à long terme de la lombalgie!

L’ostéopathe établit un diagnostique à partir des dysfonctions relevées et peut expliquer les causes de troubles très variés rentrant ou non dans son expertise. Il est donc en mesure de suspecter tout type de pathologies. Un temps de questionnement précis sur vos symptômes permet d’affiner cette recherche et d’éviter dans certains cas d’avoir recours à des médicaments ou des examens médicaux. Au besoin, votre ostéopathe saura vous orienter vers un autre professionnel de santé.

Les deux courants de l’ostéopathie viscérale : mécanique ou fluidique ?

Deux approches sont possibles et souvent complémentaires en ostéopathie viscérale :

L’approche mécanique

Selon cette vision du fonctionnement viscéral, les organes possèdent une mobilité dans le ventre qui est rythmée par la respiration et influencée par leurs moyens d’union avec les autres organes. Les dysfonctions sont décrites comme des pertes de mobilité des organes : quand un organe ne suit plus son mouvement physiologique.

L’ostéopathe mettra en place un traitement global composé de plusieurs techniques sur différents organes pour permettre à l’ensemble du système viscéral de reprendre un fonctionnement normal.

En pratique, cette technicité peut être un peu sensible (sans être très douloureuse) mais les résultats sont souvent impressionnants de rapidité et d’efficacité.

L’approche fluidique

C’est la vision qui s’intéresse à la motilité des organes. Cette approche tient compte des mouvements des organes du système digestif à la respiration mais ne les associe pas. L’ostéopathe Jean-Pierre Barral a défini et mis en évidence cette théorie sur le fonctionnement des organes.

Selon lui, un viscère se mobilise par un mouvement lent, de faible amplitude et non perceptible à l’oeil nu. L’ostéopathe suit les mouvements des organes en les testant un par un et les traite en fonction de leur mouvement propre. Cette approche est plus douce et moins invasive que l’approche mécanique.

Il n’existe à ce jour aucune étude ou explication rigoureusement scientifique de ces mouvements de motilité mais les résultats empiriques des traitements mis en pratique par de nombreux ostéopathes sont encourageants.

Ces deux approches tiennent compte de l’influence des organes entre eux. Les autres structures anatomiques en lien seront aussi testées et traitées pour éviter la recrudescence de la douleur.

Comment l’ostéopathe sait ce qui pose problème ?

En premier lieu, l’ostéopathe recherche une perturbation de la mobilité des organes, c’est-à-dire leurs mouvements dans le corps par rapport aux moyens d’union grâce auxquels ils sont articulés. Dans un second temps, il teste la motilité des organes (mouvements intrinsèques à l’organe même).

Il relèvera la présence de :

  • Fixations articulaires (correspondant à des adhérences entre les fascias des organes) partielles ou totales, conséquentes à un processus de cicatrisation naturel ou chirurgical
  • Fixations ligamentaires (rigidification des moyens d’union des organes)
  • Fixations musculaires (spasmes des organes creux modifiant leur amplitude de mouvement et leur motilité).

Examen clinique médical

  • Palpation de la tonicité des différentes zones abdominales
  • Percussion pour localiser ou dimensionner certains organes
  • Auscultation pour en examiner la bonne fonction

Test de motilité

L’ostéopathe cherche à évaluer les axes et amplitudes de la motilité d’un viscère : mouvement pendulaire de direction et d’axe autour d’un point neutre pouvant perdre sa symétrie (limitation dans un sens et facilitation dans l’autre).

Cette étude repose sur l’écoute passive du fonctionnement des organes. Le praticien pose ses mains pour sentir les mouvements propres à l’organe sans chercher induire le mouvement de l’organe dans le corps.

Test de mobilité

L’ostéopathe cherche à évaluer les axes et amplitudes de la mobilité d’un viscère : mouvement de l’organe dans le corps en fonction de ses moyens d’union et suivant la respiration. Cette étude repose sur l’écoute active du fonctionnement des organes. Le praticien teste l’organe dans tous les plans de l’espace dans le corps.

Organes par zone anatomique viscérale

L’abdomen est divisé en 9 zones pour faciliter le repérage anatomique des organes.

Hypochondre Droit Epigastre Hypochondre Gauche
Foie
Vésicule biliaire
Angle colique droit
Rein droit
Estomac
Duodenum
Colon transverse
Pancréas
Aorte abdominale
Estomac
Duodenum
Ratte
Pancréas
Région latérale droite Région ombilicale Région latérale gauche
Colon ascendant
Uretère droit
Intestin grêle
(duodénum + jéunum + iléum)
Côlon transverse
Aorte abdominale
Colon descendant
Uretère gauche
Région inguinale droite Hypogastre Région inguinale gauche
Caecum
Appendice vermiforme
Ovaire droit
Partie latérale de la
trompe de Fallope
Iléum
Côlon sigmoïde
Prostate
Rectum
Vessie
Utérus
Côlon sigmoïde
Ovaire gauche
Partie latérale de la trompe de Fallope

Pourquoi consulter un ostéopathe pour une problématique viscérale ?

La réponse de la médecine conventionnelle aux troubles viscéraux fonctionnels est bien souvent limitée aux médicaments.

Sans chercher à se poser la question de l’efficacité d’un traitement médicamenteux pour soulager un symptôme viscéral, on peut néanmoins s’interroger sur la problématique initiale. Pourquoi ce symptôme ? Pourquoi ai-je mal au ventre ?

Qu’est ce que ce trouble dit de mon corps ?

Ces questions résultent de l’investigation menée par votre ostéopathe. Il cherchera toujours à savoir pourquoi vous, en tant qu’être humain possédant ses particularités, avez mal.

Les plaintes peuvent être variées et toucher de nombreux systèmes. En voici quelques exemples :

« J’ai mal en bas du ventre parce que je suis constipé depuis 1 semaines, je vais à la selle une fois tous les 3 jours. »

  • priori, ce patient a un problème d’ordre digestif et l’ostéopathe testera et traitera certainement l’intestin grêle et le côlon.

« De temps en temps, j’ai mal au milieu et à gauche du ventre et je n’arrête pas d’aller aux toilettes pour uriner. J’ai mal dans le dos aussi et je bois peu d’eau dans la journée »

Ce patient a lui aussi mal au ventre, mais pas au même endroit et sa plainte est liée à une problématique urinaire. L’ostéopathe pourra éventuellement réorienter vers un autre professionnel de santé ou les urgences si des conseils hygiéno-diététiques ne suffisent pas.

« J’ai mal dans le bas et à droite du ventre pendant mes règles, c’est vraiment très douloureux mais en dehors plus rien »

Cet exemple nous montre là aussi qu’un mal de ventre n’est pas forcément digestif ! Cette patiente a certainement une problématique d’ordre gynécologique.

« J’ai eu très mal en haut du ventre, à droite sous les côtes après un gros repas ce midi. J’ai jamais eu ça, j’ai mangé trop gras ! Ça me lance quand je respire »

La plainte est liée à l’alimentation, pour autant ce n’est pas un organe qui permet le transit des aliments qui est à priori touché. Cela peut être le foie qui est sensible aux excès, plus particulièrement la vésicule biliaire.

Attention ! Dans ce dernier cas le patient vient d’avoir mal ! Et il continue à avoir mal. C’est la première fois qu’il ressent cette douleur. L’ostéopathe continuera son investigation et se posera la question de réorienter en urgence car la pathologie peut être grave.

Pathologies par zone anatomique viscérale

Hypochondre Droit Epigastre Hypochondre Gauche
Hépatite
Lithiase biliaire
Angiocholite aiguë
Cirrhose
Cancer du foie
Gastrite
Hernie hiatale
Ulcère gastrique
Ulcère duodénal
Pancréatite chronique / aiguë
Cancer du pancréas
Rupture de l’anévrisme ou dissection de l’aorte abdominale
Gastrite
Hernie hiatale
Ulcère gastrique
Ulcère duodénal
Pancréatite chronique / aiguë
Cancer du pancréas
Recto-colique hémorragique
Crohn
Cancer du colon
Diverticulite
Pathologies touchant la rate (toxoplasmose, VIH, leucémie, lymphome, mononucléose infectieuse, paludisme)
Région latérale droite Région ombilicale Région latérale gauche
Cancer du côlon
Crohn
Cancer du côlon
Diverticulite
Polypose
Lithiase urétérale supérieure
Pyélonéphrite
Glomérulonéphrite
Gastro-entérite
Adénite mésentérique
Maladie coeliaque
Crohn
Occlusion intestinale
Rupture d’anévrisme de l’aorte abdominale
Cancer du côlon
Recto colique hémorragique
Cancer du côlon
Diverticulite
Polypose
Lithiase urétérale supérieure
Pyélonéphrite
Glomérulonéphrite
Région inguinale droite Hypogastre Région inguinale gauche
Crohn
Appendicite
Adénite mésentérique
Hernie inguinale / crurale
Lithiase urétérale inférieure
Prostatite
Adénome de la prostate
Cancer colorectal
– Cancer de la prostate
– Cancer de la vessie
Cancer colo-rectal
Sigmoïdite
Recto colique hémorragiqueDiverticulite
Hernie inguinale / crurale
Chez la femme :
Endométriose
Grossesse extra utérine
Kyste ovarien
Rupture kystique
Torsion d’annexe
Salpingite
Cancer ovarien
Chez la femme :
Cystite
Endométriose
Fibrome utérin
Cancer de l’endomètre, de l’utérus et du col de l’utérus
Chez la femme :
Endométriose
Grossesse extra utérine
Kyste ovarien
Rupture kystique
Torsion d’annexe
Salpingite
Cancer ovarien

L’ostéopathie, un traitement naturel pour soulager un trouble viscéral fonctionnel

C’est pendant le traitement que l’ostéopathe relance la moBilité des organes par des techniques directes (sur l’organe) et indirectes (sur les structures en rapport musculo-ligamentaire, nerveux etc …). Il relancera également la moTilité de l’organe par des techniques d’induction (L’ostéopathe exagère le mouvement induit par l’écoute en l’entrainant dans sa direction facilitée).

Il respectera les lois de précision (l’ostéopathe sera sélectif dans sa palpation et son traitement), de moindre force (l’ostéopathe ne dépassera pas les limites physiologiques des tissus qu’il manipule) et les spécificités de chaque patient. Votre ostéopathe tiendra compte des contre-indications absolues et relatives au traitement (traitement anti-coagulants, corticothérapie, diabète, présence de ganglions, radiothérapie etc …).

Contre-indications absolues:

  • Femmes enceintes
  • Cancer d’un organe du système digestif ou cancer ostéophyle (c’est à dire particulièrement susceptible de métastaser)
  • Chirurgie digestive récente
  • Fièvre

L’ostéopathe pourra vous donner quelques indications à respecter avant le traitement (traitement plus facile l’estomac vide, bonne hydratation). La prise en charge excède rarement 2 ou 3 séances pour une problématique, généralement espacées de 2 à 3 semaines.

Prévention, complémentarité et conseils

Quelle que soit votre plainte, une question doit se poser : quels sont vos symptômes ? Listez -les, déterminez leur fréquence, la première fois que vous les avez ressentis, et est-ce qu’ils évoluent par crise ? à certains moments de la journée ? La nuit ?

Toutes ces questions, vous pouvez vous les poser sans être un professionnel de santé.

Quelques conseils par système :

  • Digestif haut (oesophage/estomac) et digestif bas (duodénum, foie, pancréas, rate, intestin grêle, gros côlon) :

Privilégier une alimentation moins abrasive et moins acidifiante pour l’organisme (se référer à l’indice PRAL). Limiter voire supprimer : alcool, café, tabac. Examiner les apports protéique, glucidique et lipidique. Rapprochez-vous de votre nutritionniste ou d’un gastro-entérologue.

  • Rénal (rein, uretères) : vous devrez prendre garde à boire beaucoup plus souvent de l’eau dans la journée pour éviter une pyélonéphrite (au moins 1,5L par jour en au moins 5 prises). Ce conseil s’applique à tous les systèmes. Rapprochez vous d’un urologue.
  • Uro/génital (vessie, urètre, prostate, appareil reproducteur) : veillez à respecter des règles hygiéniques scrupuleuses pour éviter les infections urinaires, cystites etc. Consultez un gynécologue ou un urologue.

Dans tous les cas, alertez-vous si vous avez de la fièvre, si vous ressentez une douleur vive et inconnue qui dure et résiste aux antidouleurs et anti-inflammatoires classiques. N’hésitez pas en cas de doute à contacter votre ostéopathe, il saura vous dire si une consultation avec lui est nécessaire ou si une prise en charge différente s’impose.

Conclusion

L’ostéopathie viscérale apparait comme une solution parfaitement adaptée à n’importe quel symptôme dont l’origine est fonctionnelle. En effet, aucune autre profession du secteur médical ou paramédical ne possède à ce jour de réponse plus adaptée et naturelle au traitement des dysfonctions viscérales. Les mains de l’ostéopathe permettent un diagnostique fonctionnel des organes pouvant vous rassurer sur l’origine de votre problématique et vous soulager en quelques séances.

En collaboration avec votre nutritionniste, votre praticien saura apporter à votre système digestif les clefs de son équilibre.

BIBLIOGRAPHIE

  • BARRAL J-P. CROIBIER A., Manipulations vasculaires viscérales, Ed. Elsevier, 2009
  • BEAUME S., Dictionnaire de médecine ostéopathique, Ed. Elsevier Masson, 2014
  • BOUSCARLE C., Approche comparée des pratiques viscérales ostéopathique et médicale, Mémoire de fin d’études pour l’obtention du Diplôme d’Ostéopathe FERO, Paris, 2013