Présentation

Pour que l’homme s’érige en bipède, sa colonne vertébrale s’est au fil des millénaires décomposée en trois courbures ergonomiques pour absorber au mieux les contraintes de son environnement.

  • La lordose lombaire (5 vertèbres) à concavité postérieure
  • La cyphose thoracique (12 vertèbres) à convexité postérieure
  • La lordose cervicale (7 vertèbres) à concavité postérieure

La lordose cervicale prolonge la cyphose thoracique. Cette portion de la colonne vertébrale soutient la tête et constitue la charpente de la loge viscérale du cou. Elle est en lien étroit avec les efférences et afférences vasculo-nerveuses du crâne ainsi que les muscles du cou (déglutition, manducation) et inspirateurs accessoires. C’est le segment rachidien le plus souple et le plus mobile. Il a pour but d’orienter la tête dans l’espace et joue donc un rôle fondamental dans la vision et l’équilibration.

L’accentuation ou l’effacement de la lordose cervicale se définit comme une exagération ou une diminution de la concavité de la zone cervicale. Ces phénomènes peuvent altérer la biomécanique rachidienne et l’équilibre générale de la colonne créant des douleurs cervicales (ou cervicalgies) . Ces altérations pourront contrarier le fonctionnement des chaines musculaires, des dysfonctions articulaires vertébrales ainsi que des troubles viscéraux, neurologiques et respiratoires qui pourront être la cause de sérieuses douleurs et de graves complications.

Toutefois, à la différence des hyperlordose lombaire et hypercyphose thoracique, les cervicales ne présenteront pas de troubles morphologiques aussi marqués mais d’avantage des dysfonctions de leur fonctionnement extrêmement sensible et précis.

Les cervicales sont les vertèbres qui présentent le plus de mobilité dans tous les plans de l’espace. Ainsi elles permettent des mouvements de flexion/extension, rotations et inclinaisons ce qui en fait une zone fonctionnelle majeure et un lien entre le tronc et la tête. La zone cervicale est en effet directement ou indirectement liée à tous les systèmes et à toutes les fonctions du corps humain.

Rappels anatomiques :

Le Rachis cervical bas (C3 à C7) :

Les 5 dernières vertèbres cervicales sont composées d’un corps vertébral cubique avec des uncus. L’articulation de deux corps vertébraux cervicaux est appelée unco-vertébrale ; les uncus étant des rails sur les bords des corps vertébraux. Ces articulations sont semi-mobiles et permettent des mouvements de glissement antéro-postérieur, d’inclinaison latérale et de rotation axiale. Les surfaces articulaires supérieures (orientées en haut et en arrière) et inférieures (orientées en bas et en avant) sont concaves et recouvertes de cartilage.

La vertèbre cervicale basse est également composée d’un arc postérieur relié par des pédicules très courts au tiers postéro-supérieur du corps. Les pédicules sont eux-mêmes reliés entre eux par les lames qui se rejoignent en un long et plat processus épineux (bifide, oblique en bas et en arrière). Les massifs articulaires postérieurs se trouvent à la jonction des pédicules et des lames. Ils sont au nombre de 4 par vertèbre et assurent le complexe articulaire postérieur des thoraciques. On dénombre également 2 apophyses transverses (assez petites) par vertèbre cervicale situées entre les processus articulaires supérieur et inférieur, devant les lames et derrière les pédicules. Elles sont perforées (sauf en C7) par le foramen transversaire où passe l’artère vertébrale.

Ces structures délimitent le canal rachidien avec la moelle épinière le traversant ainsi que les foramens laissant passage aux nerfs sensitifs et moteurs et aux artères vertébrales à chaque étage rachidien. Ces foramens sont délimités par les processus articulaires postérieurs, les 2 pédicules, le disque et la partie postéro latéral du corps vertébral.

Les vertèbres cervicales basses s’articulent autour de 4 articulations cartilagineuses (entre les processus articulaires postérieurs), 3 articulations fibreuses (2 intertransversaires et 1 interépineuse) et 1 articulation discale fibrocartilagineuse (entre deux corps vertébraux autrement appelée inter-corporéale).

Le Rachis cervical haut (C1 à C2) :

La première vertèbre cervicale (C1) est appelée Atlas. Elle est dite en anneau avec un arc postérieur, un arc antérieur et 2 masses latérales qui supportent en haut la glène de C0 et en bas la facette articulaire avec C2.

La deuxième vertèbre cervicale (C2) est appelée Axis. Son apophyse odontoïde s’articule avec l’arc antérieur avec une base, un col, un corps et un sommet. La partie inférieure est semblable aux autres vertèbres.

Les articulations intervertébrales se composent des articulations entre les 5 vertèbres cervicales basses et de la charnière cranio rachidienne avec :

  • L’articulation occipito-atloïdienne
  • L’articulation atloïdo-axoïdienne
  • L’articulation entre axis et os occipital

Les cervicales hautes sont les vertèbres qui permettent le plus de mouvement. Elles présentent d’importants degrés de liberté dans tous les plans de l’espace car leur taille est plus petite que les autres vertèbres du tronc.

La somme des mouvements des 7 vertèbres cervicales permet :

  • De 100° à 150° de flexion/extension avec en moyenne 45° en flexion et 55° en extension. 30°; gérée par les cervicales hautes et 70° par les basses.
  • De 60 à 70° d’inclinaison gérée par les cervicales basses quasi-uniquement.
  • De 70° à 100° de rotation dont la moitié est gérée par le seul couple C1/C2 et le reste par les cervicales basses

Muscles responsables de la flexion cervicale : Muscles long du cou, grand droit antérieur, petit droit antérieur, droit latéral, inter-transversaires, scalènes.

Muscles responsables de l’extension cervicale : Muscles sterno-cleido-mastoidien , para-vertébraux, trapèze, sous-occipitaux.

Muscles responsables de l’inclinaison cervicale : Muscle sterno-cleido-mastoidien, sous-occipitaux, scalènes.

Muscles responsables de la rotation cervicale : Muscle sterno-cleido-mastoidien, sous-occipitaux, scalènes.

Diagnostique : Quelle population est touchée par les cervicalgies ?

Quelles en sont les causes ?

Le pré-diagnostique est établi lors d’un examen physique chez le médecin généraliste ou l’ostéopathe en effectuant des tests actifs, passifs ainsi que des tests orthopédiques. On notera la cohérence de l’ensemble des courbures du tronc et on prendra soin de tester la mobilité de la charnière cervico-dorsale.

Les causes primaires ou constitutionnelles correspondant au morphotype familial ou ethnique :

  • Malformation congénitale

Les causes secondaires biomécaniques c’est à dire les facteurs fonctionnels annexes qui influencent les mouvements des vertèbres cervicales :

  • Syndrome des processus articulaires postérieurs (douleur ponctiforme, souvent latéralisée et aggravée en extension et inclinaison homolatérale de tête).
  • Contracture des muscles du cou (spinaux, scalènes, trapèze, élévateur de la scapula etc …) entrainant une diminution des amplitudes articulaires de référence du rachis cervical.
  • Accumulation de tissu adipeux plus ou moins dense au niveau de la charnière cervico-dorsale (bosse de bison).
  • Hypercyphose thoracique (par compensation celle ci peut entraîner des cervicalgies).

Symptômes : Comment détecter une pathologie des cervicales ?

  • Douleurs musculaires et raideurs diffuses, et chroniques le long du rachis cervical et dorsal pouvant être mécaniques (réveillées à un ou plusieurs mouvement) ou inflammatoires (présentes à tous les mouvements, réveillant la nuit et mettant plus de 30 minutes à disparaître au réveil) et souvent aggravées par le sport.
  • Déformations vers l’arrondissement (hyperlordose) ou l’effacement (méplat) de cette lordose.
  • Irradiations (sensations de trajet électriques ; impulsifs ou non) vers la tête, la nuque, le membre supérieur survenant essentiellement lors d’un ou d’un combinaison de mouvements du cou. Ces irradiations peuvent être ressenties jusque dans les doigts.
  • Paresthésies (sensations diffuses dans les membres comme des fourmillements ou un engourdissement, des brûlures).
  • Perte plus ou moins importante de la sensibilité intéressant les métamères innervés par les racines cervicales concernées.

Causes : Quelles sont les pathologies qui peuvent entrainer des cervicalgies ?

  • Arthrose cervicale (usure des facettes articulaires postérieures).
  • Ostéoporose (diminution de la densité osseuse des vertèbres).
  • Discopathies (tassement discal, hernie).
  • Névralgies cervico-brachiales NCB (c’est une radiculalgie, c’est à dire une irritation ou compression d’une racine nerveuse du plexus cervical ou du plexus brachial en un ou plusieurs étages vertébraux. Elles peuvent donner des irradiations suivant le trajet du nerf atteint jusque dans les doigts et des douleurs cervicales et du membre supérieur vives et lancinantes).
  • Névralgies occipitales ou névralgies d’Arnold (irritation ou compression du grand nerf occipital postérieur ou du petit nerf occipital. La douleur est unilatérale, à l’arrière de la tête et le patient peut ressentir une sensibilité exacerbée de son cuir chevelu ainsi que des irradiations dans l’oeil).
  • Céphalées occipitales ou frontales (elles correspondent à des mots de tête en avant ou en arrière du crâne).
  • Migraines (maux de tête latéralisées à gauche ou à droite du crâne).
  • Syndrome de la traversée cervico-thoraco brachial TCTB (même principe que la NCB mais l’irritation du nerf se fait par compression au niveau d’un tronc nerveux et non au niveau d’une racine. La compression se fait ainsi au niveau de l’épaule dans le cas du TCTB.
  • Les pathologies dentaires et de l’ATM (articulation temporo-mandibulaire) peuvent elles aussi entrainer des cervicalgies (caries, bridge mal adaptée, ablation dentaire, fracture de la mâchoire, luxation mandibulaire).
  • Plus rarement une inflammation de l’oesophage ou de la trachée peut entrainer des cervicalgies.
  • La méningite (pouvant être virale ou bactérienne) entraine une raideur nucale et des vomissements en jet associée à des céphalées. C’est une urgence vitale et heureusement une pathologie relativement rare.

Traitement : Comment limiter les symptômes ?

  • Pour une légère accentuation ou diminution de la lordose et quelques cervicalgies, un changement d’attitude posturale et des conseils adaptés suffisent à limiter les symptômes et à ralentir la progression. La prise de conscience des vices posturaux est fondamentale pour limiter la survenue d’une pathologie.
  • Pour des cervicalgies installées, des séances d’ostéopathie, de kinésithérapie peuvent permettre de soulager les douleurs.
  • Dans les cas plus graves avec des symptômes insupportables ou invalidants, des anti-inflammatoires, un traitement antalgique et des décontractants musculaires sont envisagés voir une opération chirurgicale visant à stabiliser la structure osseuse.

Lien ostéopathique : Comment l’ostéopathie peut diminuer les symptômes d’un syndrome cervical ?

L’ostéopathe peut, par une étude approfondie du tonus postural en statique et en dynamique, déterminer un axe de traitement et des conseils adaptés à la situation du patient. En tant que discipline de 1ère intention, son rôle dans le dépistage est majeur. Si le diagnostique est suffisamment précoce, l’étude des chaines musculaires, des dysfonctions articulaires, viscérales et faciales sont autant d’éléments à prendre en compte pour comprendre au mieux son patient et mener à bien une thérapie durable et personnalisée pouvant limiter considérablement les douleurs et la progression du syndrome cervical.

Nous l’avons vu, les cervicalgies peuvent avoir des causes multiples (problèmes dentaires, lunettes mal adaptées, vieillissement osseux, contracture musculaire, usure discale, inflammation des voix respiratoires et digestives hautes etc …). Ainsi, trouver la cause de la douleur sera la première préoccupation de l’ostéopathe !

Voila pourquoi parfois lors d’une consultation, votre praticien ne s’attarde pas beaucoup sur la zone douloureuse : Elle n’est pas toujours la source du problème.

Prenons l’exemple d’un jeune homme se plaignant de douleurs dans le haut de la nuque. Après avoir fait les tests éloignant les pathologies graves et celles pour lesquelles l’ostéopathie demeurerait inefficace, le praticien s’aperçoit au cours de son anamnèse que le patient remonte machinalement ses lunettes sur son nez toutes les 10 secondes et qu’il lui faut lever la tête pour lire un document.

Après observation de ses lunettes, l’ostéopathe détermine enfin l’origine de la douleur! Le patient a des contractures musculaires et des blocages articulaires cervicaux qui sont dues à un port de lunettes mal adaptées à la morphologie de son crâne et de sa face (verres beaucoup trop grands, et branches trop courtes par exemple). Après une détente des muscles douloureux (les sous occipitaux) et la normalisation des dysfonctions adaptatives, le patient devra changer ses lunettes et les douleurs cervicales disparaitront pour de bon.

C’est un exemple de l’application de l’ostéopathie qui par des conseils adaptés et une bonne réorientation du patient peut régler une douleur qui ne passerait pas avec un simple traitement.

Les applications manuelles de l’ostéopathie sont nombreuses. Pour détendre un muscle, l’ostéopathe peut effectuer des manipulations d’étirement plus ou moins douces, traiter les adhérences des tendons dans leur gaine, travailler le corps musculaire directement ou traiter en fascia; il peut s’aider de contractions effectuées par le patient pour renforcer ou détendre le muscle ou encore libérer les blocages articulaires. L’ostéopathe déterminera toujours la technicité la plus adaptée au patient, à la zone anatomique à traiter et à la cause de la cervicalgie bien sûr.

Des exercices et conseils peuvent être très efficaces :

  • Conseiller à l’enfant de marcher avec son cartable bien serrer dans son dos en reposant les bras sur les bretelles. Ainsi, le centre de gravité du corps de l’enfant ne sera pas déplacé et son corps sa musculature cervicale sera moins sollicitée.
  • Pour les sujets âgés, l’atteinte ostéo-articulaire et les déformations sont souvent trop importantes pour envisager un traitement correcteur mais des exercices quotidiens d’étirements peuvent durablement soulager les symptômes.
  • Pour les employés de bureaux et travailleurs sur écran, il est primordial de porter des lunettes de vue adaptées aux écrans car la biomécanique cervicale est en lien étroit avec la vue.
  • Le port de sac en bandoulière ou de sac à dos trop lourd bloque la biomécanique des épaules lors de la marche. Privé de ce balancier, le corps impose d’importantes contraintes compensatoires aux cervicales. Solution ? Porter des charges moins lourdes ou opter pour un sac à roulettes ou alterner la bandoulière d’une épaule à l’autre.
  • Des travaux dentaires ou le port de lunettes adaptés peuvent à eux seuls venir à bout d’une cervicalgie.

SOURCES :

  • https://www.vulgaris-medical.com/encyclopedie-medicale/syndrome-cervical/symptomes
  • https://www.vulgaris-medical.com/encyclopedie-medicale/lordose-lombaire
  • http://www.bdsp.ehesp.fr/Base/298930/
  • Centre Européen de la Colonne Vertébrale – http://www.demauroy.net/ ;
  • Revue du Rhumatisme 71 (2004) 137-144 – Comment examiner un trouble de la statique rachidienne ?
  • Roussouly P,Pinheiro-Franco JL. Sagittal parameters of the spine : Biomechanical approach. Eur Spine J 2011
  • https://www.caducee.net/DossierSpecialises/rhumatologie/cyphose-lordose.asp